vendredi 22 juin 2012

Attention débat: la vidéo c'est sérieux?

C'était une éventualité, c'est maintenant une réalité : le sérieux fait son entrée dans l'arène... Pourquoi le sport mondial par excellence est-il aussi réticent à user les technologies à sa disposition pour se bonifier? Moins d'injustice, plus de clarté, le foot n'aurait-il pas tout à y gagner? Mais voilà, un cartel de têtes pensantes et dirigeantes, Platoche en chef de file, s'y opposent. "Hou, les vilains!" crie la populace éclairée mais peut-être que la raison n'est pas de l'ordre du populaire...


Big Brother is not watching football...

Les arbitres auteurs de bévues lors des matches de poules et pour lesquels l'Euro est déjà terminé, deviendront sans doute dans quelques jours d'ardents défenseurs de la vidéo dans la surface. Laissés en pâture par des dirigeants réactionnaires, ils ont été découpés à la moulinette de la vidéo. Leurs erreurs? Le penalty manqué sur Karagounis, Pologne-Grèce (un penalty manqué, une expulsion sévère et un but injustement refusé), le but ukrainien non validé contre l'Angleterre et les deux action répréhensibles de Ramos et Busquets dans leur surface. Leur destin n'eut-il pas été tout autre si la fée vidéo avait pointé ses objectifs pour les suppléer dans leur tâche?

Une partie de Mikado humain

À chaque grande compétition, le recours à la vidéo est clamé à cor et à cri par les victimes de l'injustice (le trio joueur-entraîneur-supporteur). Autoriser la vidéo pour les actes litigieux dans la surface, disent-ils, permettrait de couper court aux polémiques. Finis les buts injustement refusés, les penalties seraient valablement sifflés ou refusés et les hors-jeux imaginaires appartiendraient au passé. Un peu de modernité que diable! Le football a longtemps tergiversé mais le dénouement de ce feuilleton semble proche. Le président de la FIFA, Sepp Blatter n'a-t-il pas tweeté: "Après le match d'hier (Ukraine-Angleterre), la technologie sur ligne de but n'est plus une possibilité, c'est une nécessité". Une décision concernant deux projets de technologie aidant les arbitres doit être rendue le 5 juillet par l'instance décideuse des lois du foot, le board. Platini aurait concédé: "Joseph Blatter va le faire".

La vidéo n'est pas infaillible

Et pourtant, la résistance n'était pas dénuée de raison. D'une, la vidéo ne réglerait pas tous les problèmes. Des doutes subsisteraient certaines fois. En de rares occasions, la vidéo pourrait même tromper son monde. C'est arrivé par le passé... Le souvenir vivace de Brésil-Norvège du mondial 98 est une plaie béante encore dans toutes les mémoires. Pour les gamins, les ignorants ou les insouciants, Tore André Flo, l'attaquant norvégien, avait été tiré par le maillot dans la surface par Junior Baiano. Les dix-sept caméras officielles de la rencontre ne voyaient qu'une simulation de l'attaquant quand l'arbitre, l'américain Esfandiar Baharmast, sûr de lui, indiquait le point de penalty en montrant la faute de Baiano. Voici les images officielles, telles que vues par des millions de téléspectateurs:



Le penalty, et le but qui s'ensuivit, provoquèrent la qualification de la Norvège aux dépens du maroc. Le monde entier prit fait et cause contre l'arbitre, accusé, en tant qu'américain, de ne pas avoir le niveau international. Seul contre tous, l'homme en noir trouva le salut, après quarante-huit heures de lynchage, quand une télévision suédoise apporta de nouvelles images. En cliquant ici vous verrez une vidéo montrant l'arbitre du match expliquer les faits, images à l'appui:

La vidéo n'est point infaillible, loin de là. Le ralenti, aussi beau soit-il, efface la vitesse qui peut expliquer qu'un léger contact se transforme en chute (Ravanelli...). Dans le match d'hier, brillamment remporté par le Portugal contre la République tchèque, deux ou trois actions dans la surface tchèque prêtèrent à confusion. Dans aucun des cas, la vidéo ne permettait d'aller clairement dans un sens ou dans un autre.

Alors, faute ou pas?
La vidéo casse le rythme

Deuxièmement, et c'est le principal point noir, la vidéo casse le rythme d'une rencontre. Qui a vu des matches de TOP 14 (rugby), cette année, en témoignera. En de trop nombreuses occasions, les vérifications vidéos quant à la validité d'un essai ont pris plusieurs minutes pour un résultat souvent contestable! Si ces interruptions peuvent à la rigueur cadrer avec un sport qui demande de laisser des moments de répit aux organismes, le foot s’accommode mal de pauses répétées. Celui-ci a besoin, au contraire de rythme, pour mettre à mal les défenses regroupées. Casser l'intensité d'une rencontre comme savent si bien le faire les truqueurs et les simulateurs, nuit à la beauté du spectacle.

Actuellement, le statut du quatrième et du cinquième arbitre étant encore précaire, ceux-ci n'osent peut-être pas prendre des décision franches. La peur de se tromper a sans doute empêché le cerbère campé sur la ligne de but anglaise de valider le but. Mais, elle a permis à deux autres assistants de rendre de bonnes décisions: le "but" de Pepe contre l'Allemagne justement refusé et le but de Cassano pertinemment validé. La meilleure solution serait de combiner arbitrage à cinq et, soit un système de puce, soit une vidéo UNIQUEMENT sur la ligne

Attentif, le guignol en noir!
La vidéo n'a pas de limites

Troisièmement, l'utilisation de la vidéo est profondément injuste. Les partisans de la vidéo, répondent à l'argument précédent en assurant que cela ne concernerait que les actions dans la surface. Mais certaines fois une action litigieuse à trente mètres du but est plus dangereuse qu'un accrochage dans l'angle de la surface. Le hors-jeu de l'attaquant partant au but, et à qui on nie le droit d'aller défier le gardien, est-il moins important que la poussette sur corner? Si la réponse est non, alors il faudra mettre la vidéo partout pour qu'elle soit vraiment juste et le foot se transformera en american football avec ses interruptions incessantes.

La vidéo du direct, hormis sur la ligne de but, dessert le jeu et le spectacle. En revanche, son utilisation doit être intensifiée a posteriori pour les sanctions et les acquittements. Pour l'instant, elle sert surtout à sanctionner les auteurs d'actes dangereux. Il faut aller beaucoup plus loin en traquant systématiquement les simulateurs qui obtiennent penalties, cartons jaunes et expulsions. Il faut également, pour les instances, accepter d'effacer les erreurs des arbitres, en rétablissant dans leur droit les joueurs injustement condamnés. Un certain Karagounis, qui ne jouera pas le quart de finale de ce soir, est bien sûr dans nos pensées...Allez, Karagounis, troisième!!!!



A part ça, le quart c'est demain...


Erwan Berthou


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