dimanche 24 juin 2012

"L'Espagne m'a tromper!"

Lettre d'un amant éconduit, autrefois amoureux de cette Espagne joueuse et offensive, il ne reconnait plus sa belle andalouse, transformée en une machine à conserver le ballon sans passion.




Ma tendre Espagne,


Ô comme je t'ai aimée, à en perdre la raison quand celle-ci me ramenait sans cesse vers le bleu-blanc-rouge. Flamboyante comme nulle autre, tu as remis le football offensif au goût du jour aidée en cela par le Barça. 2002, 2004, 2006, tous les deux ans le même spectacle présidait. Les noms changeaient mais l'arrière goût de "tout pour la défense" gâtait chaque fois le plaisir.

Que ce fut beau!

Et puis, Rijkaard, Aragones, Guardiola et pour un temps Del Bosque ont changé l'ordre établi. La maîtrise du cuir et la volonté de marquer des buts, philosophies mises sous l'éteignoir de la défense, ont de nouveau triomphé au niveau international grâce à toi. En 2008, ton petit jeu rapide s'appuyant sur la justesse technique avait pris de court l'Europe entière. Douze but marqués en six matches, un amour du beau jeu qui transportait les foules, j'étais conquis.

Ô Carlos comme tes bouclettes me manquent...

Depuis ce coup de foudre, tu as fait du chemin mais tu sembles t'être égarée. Tu avais certes glané le titre suprême mais déjà des voix s'élevaient pour critiquer ton jeu stéréotypé et manquant de passion. Comme beaucoup d'amoureux transis, je m'offusquais et mettais cela sur le compte de la jalousie. Des envieux ne voyant pas la maîtrise suprême, voilà ce qu'ils étaient tous!

Quitte cette amour de la conservation du ballon sans fin !

J'étais aveugle, ébloui par le rouge épicé de jaune qui faisait de tes techniciens des diablotins insaisissables... même si les huit buts en sept matchs en Afrique du sud auraient du me mettre la puce à l'oreille. Mais depuis le début du présent tournoi, j'ai commencé à recouvrer la vue avec un réveil brutal hier soir. Je savais depuis longtemps que la conservation du ballon étais davantage une arme défensive qu'offensive. En gardant le ballon, tu privais l'adversaire de munitions. Mais, il fut un temps où cette conservation du ballon te servait aussi à attaquer.

Ô Andrés, réveille toi!

Dans cet Euro, l'élastique freinant ta progression vers la cage adverse s'est peu à peu tendu peu. Hier, la tension des matches à élimination directe a encore durci l'élastique. Le match débridé auquel beaucoup aspiraient n'a pas eu lieu. Personnellement, je ne croyais pas à ce scénario mais rêvais de passion. Ton amour du jeu devait t'attirer vers le but mais, comme trop souvent, sitôt le score ouvert tu as semblé te complaire dans la ligne des trente mètres adverses où ta science du taureau fait merveille.

"Je veux te quitter mais ne m'y résous pas"

Hier, la France n'avait pas ton niveau technique. Ton aura a poussé à défendre ce regroupement d'attaquants sans âme encore dans les balbutiements de son jeu collectif. L'engagement même était de ton côté et pourtant tu as rejeté l'amour des passionnés du jeu. En plusieurs occasions, tu eusses pu aller défier LLoris au risque de perdre le ballon mais tu as préféré la voix de la crainte en temporisant.

Ô Espagne, comme tu es loin! Tu sembles déjà faire partie du passé

Espagne, notre histoire se termine. L'Allemagne a de plus beaux atours et je souhaite sa victoire car elle porte désormais bien plus que toi l'étendard de l'offensive. D'ailleurs, il n'est même pas sûr que tu la retrouves car le bloc portugais, solide et capable de perforer à la fois, devrait te donner plus que du fil à retordre.
Espagne... Espagne... Espagne... Je veux te quitter mais ne m'y résous pas. Détrompe moi en demi et j'arrêterai cette folie...

...Johan Cruijff


Erwan Berthou également

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